L’armée béninoise a subi une attaque meurtrière dans le nord du pays, à la frontière avec le Niger et le Burkina Faso, faisant au moins 28 morts dans ses rangs.
Dans la foulée, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim, en arabe), affilié à al-Qaïda, a revendiqué le vendredi 10 janvier 2025 dans un communiqué l’attaque ayant tué ces soldats. Cette attaque a suscité une vive émotion dans l’opinion publique et dans les partis politiques, toutes tendances confondues.
Tous ces soldats, tout grade confondu, appartiennent aux effectifs de l’opération Mirador, dispositif anti-terroriste, créé en février 2022, qui compte environ 3 000 hommes. Selon les informations parvenues à notre rédaction, on apprend également que le président Patrice Talon devait rencontrer la hiérarchie militaire.
Critiques de l’opposition
Les condamnations dans la classe politique sont unanimes. Les deux grands partis du camp Talon, le Bloc républicain et l’Union progressiste pour le renouveau rendent hommage aux soldats tombés, et appellent à l’unité et à la solidarité.
Pour le parti d’opposition Les Démocrates, il s’agit d’une « tragédie nationale de grande ampleur ». Mais la parenthèse de l’union sacrée se referme très vite et l’opposition passe aux critiques. Guy Mitokpè, du parti Les Démocrates, assure : « Le parti Les Démocrates propose le renforcement de la coopération régionale, la lutte contre le terrorisme ne peut être l’affaire d’un seul camp politique ou d’un seul État ».
Autre critique, celle de Daniel Edah, leader du mouvement « Il fera beau demain » : « Notre gouvernement n’en fait pas encore assez pour la lutte contre le terrorisme autant qu’il fait depuis un moment pour les Voduns days, dans un pays pourtant laïc ». Il fait allusion à un événement en cours actuellement à Ouidah et qui connaît un succès très populaire, avec une forte implication de l’exécutif.
Soixante-douze heures après l’attaque, le gouvernement n’a toujours pas communiqué sur l’événement, sur ce qu’il fait ou ce qu’il va faire. L’opposition réclame à Patrice Talon « un deuil national de trois jours », et lui recommande d’avoir une approche régionale dans sa lutte contre le terrorisme. Une invitation à travailler notamment avec le Niger et le Burkina Faso.
À noter que ses voisins nigérien, nigérian et surtout burkinabè sont également confrontés aux défis sécuritaires posés par les groupes djihadistes. Selon un rapport publié en février 2024 par le think tank Institut pour l’économie et la paix (IEP), le Burkina Faso serait le pays le plus touché par le terrorisme, avec plus de 250 attaques sur l’année 2023, qui auraient provoqué près de 2 000 morts.
Des têtes doivent tomber
Dans une société qui se respecte, certains hauts-gradés dans le rang des Forces de Défense et de Sécurité devraient démissionner. C’est la moindre des choses dans un tel contexte. Si les concernés ne prennent pas leurs responsabilités, le gouvernement béninois devrait prendre ses responsabilités.
Suite à l’attaque meurtrière perpétrée contre des soldats béninois dans le nord du pays, Bertin Koovi, figure publique et homme politique, a exprimé sa profonde indignation sur le réseau social TikTok. Dans une vidéo virale, il a appelé à des mesures drastiques pour répondre à cette tragédie, allant jusqu’à demander la démission de plusieurs responsables de la Défense nationale.
Koovi a dénoncé la manière dont cette attaque a été gérée, soulignant le manque de préparation des soldats envoyés sur le terrain. Il s’est indigné que des jeunes recrues, avec moins de deux ans d’expérience, aient été mobilisés pour affronter des assaillants lourdement armés. « Nos jeunes ont été assassinés froidement. Ils n’étaient ni psychologiquement préparés, ni suffisamment formés pour résister à une telle agression », a-t-il déclaré.
Il a par ailleurs critiqué l’apparente absence de dispositifs de surveillance efficaces, comme des miradors ou des systèmes d’alerte, pour repérer à l’avance les engins des assaillants. Selon lui, l’attaque, survenue en plein jour et dans des conditions de visibilité optimale, aurait dû être anticipée. Bertin Koovi n’a pas mâché ses mots en appelant à la démission du ministre de la Défense et d’autres responsables stratégiques.
Il a également exhorté le président Patrice Talon à prendre des mesures fortes pour restaurer la confiance dans l’armée béninoise. « Nous devons venger nos enfants et leur rendre justice en repensant totalement notre stratégie de défense », a-t-il martelé.
Dans son discours, Koovi a également mis en cause la coopération avec le Burkina Faso, pays que les assaillants auraient utilisé comme base opérationnelle. Bien qu’il ait précisé ne pas accuser les autorités burkinabées de complicité, il a appelé à une meilleure collaboration transfrontalière pour contrer la menace terroriste.
Vivement que des enquêtes plus approfondies soient menées par le gouvernement de Patrice Talon. Quand la tête est pourrie dans une organisation, peu importe les moyens déployés, les actions se révéleront inefficaces sur le terrain.
Plus important, le gouvernement béninois devrait s’assurer de ce que les armes de dernière génération acquises à des milliards de FCFA au frais des contribuables, pour permettre à nos Forces de Défense et de Sécurité d’être efficaces sur le terrain, sont effectivement déployées sur place.
C’est à ce prix que le combat contre le terrorisme sera gagné sur le terrain. Le mal est là et si rien n’est fait, l’ennemi pourrait être tenté de frapper à nouveau. C’est une évidence pour tous : l’ennemi exploite nos faiblesses et ils nous suivent de très près.